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Articles

Affichage des articles du janvier, 2016

Résolutions (14), par Pierre-Antoine Brossaud

Cette année, on va, il le faut, ça ne peut plus continuer ainsi, c’est devenu insupportable, arrêter de stresser pour un rien. On va adopter la zen-attitude. Prendre du recul. Mettre de la distance entre nous et les petits évènements insignifiants qui nous minent sans la moindre raison. Il faut porter un regard positif sur le monde et la vie. Penser positif. Arrêter de se faire du mauvais sang, un sang d’encre, de cochon, arrêter de se le ronger, de se le manger, de se le tourner. On va rester zen, totalement zen. On va prendre la vie comme elle vient, du bon côté, avec philosophie et sagesse. On appelle ça la zen-attitude. Parce que les montées d’angoisse qui nous prennent à la gorge, nous étranglent, nous étouffent, les jets d’acide qui nous perforent l’estomac pour un oui ou pour un non, surtout pour un non, la bouche aussi sèche qu’une vieille éponge oubliée sous l’évier lorsque le Directeur des Ressources Humaines nous convoque dans son bureau, les intestins qui ne répondent p

Résolutions (13), par Pierre-Antoine Brossaud

Ce qu’on voudrait pour cette année, ce qui vraiment, on le sent, nous aiderait à nous épanouir, à nous rendre, n’ayons pas peur des mots, heureux, ça serait d’arriver à nous entourer de gens intéressants. Non pas que les gens que l’on côtoie au quotidien, nos amis, nos collègues de travail, les membres de nos familles, les commerçants du quartier, ne soient pas des gens intéressants ! C’est juste que l’on se dit, quand on y réfléchit, que l’on ne les a pas vraiment choisis, qu’ils se sont imposés dans nos vies un peu par hasard ou un peu par nécessité et que décidément, rien n’y fait, on n’arrive pas à les trouver très intéressants. On ne peut pourtant pas leur reprocher de se donner bien du mal, de faire des pieds et des mains pour parvenir à nous intéresser ! Dès qu’on leur en donne l’occasion, ils nous parlent des progrès de leurs enfants à l’école ou des exploits de leurs animaux domestiques, ils n’hésitent pas à nous jouer de la guitare, du piano, du tambour ou de la tromp

Résolutions (12), par Pierre-Antoine Brossaud

C’est pour cette année. Ça y est. C’est décidé. C’est cette année qu’on va bel et bien franchir le pas. Faire le grand saut. Se jeter à l’eau. De toute façon, on n’avait plus guère le choix. On sentait bien depuis quelques temps déjà que l’on était arrivés au bout de nos atermoiements, de nos tergiversations. On sentait bien au fond de nous ce profond désaccord qui nous tenaillait les entrailles. Au point où l’on n’osait même plus jeter un coup d’œil sur les aiguilles de notre horloge biologique (qui régulièrement se rappelle à nous par de lugubres sonneries) tant l’heure qu’on y voyait affichée nous plongeait dans une véritable panique. Son simple tic-tac même était devenu assourdissant. Mais cette fois, ça y est, et savoir que notre décision est prise, qu’elle est irrévocable, sans appel et définitive, nous aide déjà à mieux respirer. Voilà, oui, c’est exactement ça, on respire déjà beaucoup mieux. On va faire un bébé. Finalement, il suffisait d’être patient, comme quoi la

Résolutions (11), par Pierre-Antoine Brossaud

Cette année, (on a quand même bien de temps en temps le droit d’être un peu égoïstes, on ne voit pas où est le mal à se faire du bien), on s’est dit qu’on allait prendre du temps pour soi. On va se cocooner, se dorloter, se chouchouter, se bichonner. Ce qu’on va faire, c’est qu’on va fixer une bonne fois pour toutes un instant-détente, une pause-douceur dans nos emplois du temps surchargés, rien que pour nous. On peut tout à fait se dire qu’on va s’accorder, pourquoi pas le dimanche après-midi, (on a bien le droit nous aussi à notre petite pause-douceur, à notre instant-détente), une petite pause-douceur, un instant-détente pendant lesquels on pourra se ressourcer, se reconnecter avec nous-mêmes et notre bien-être. Des petits instants bien-être, câlins, détente, tout en douceur, tout en détente, très égoïstes, qui vont nous faire drôlement du bien à nous et qu’on va ritualiser, par exemple tous les dimanche après-midi, et qui seront rien qu’à nous. On va commencer par se procurer

Résolutions (10), par Pierre-Antoine Brossaud

Certes, on a depuis longtemps déjà arrêté alcool et tabac, on n’est pas complètement demeurés, arrêté également de manger viandes rouges et viandes blanches aux fibres saturées d’antibiotiques et autres toxines particulièrement cancérigènes, certes, on a évidemment mis un point final à notre consommation de poissons dont on sait trop bien qu’ils sont, tous ce qu’ils en sont les poissons, de véritables poisons à nageoires criblés de métaux lourds jusqu’à l’arête centrale, on a, doit-on le préciser, banni de notre alimentation fruits et légumes élevés aux pesticides et aux sulfates, salades irradiées aux rayons gamma, pains à base de farines scandaleusement pathogènes, huiles frelatées et carcinogènes, on ne veut plus entendre parler, quoi de plus naturel, des œufs qui sont des nids à cholestérol, des pâtes, du riz et autres féculents gorgés de gluten, du lait, du beurre, du fromage, de la crème et des yaourts hautement allergènes, on a tiré un trait sur les céréales à l’origine d’un no

Résolutions (9), par Pierre-Antoine Brossaud

On va se remettre à l’anglais. Ce n’est pas si difficile. On se souvient qu’on n’était pas si mauvais à l’école et combien on était passionnés par les thèmes étudiés. On n’a rien oublié des rêves de Martin Luther King, des boomerangs des Aborigènes, de la hauteur de la Statue de la Liberté, du plan du métro de Londres, de la recette du pudding. Alors oui c’est vrai, on était bien meilleurs à l’écrit qu’à l’oral parce qu’à l’oral on n’arrivait pas à mettre notre langue là où il fallait.  C’est le “th” qui coinçait. Au mieux on faisait un “ze”, un “ve”, un “te”, un “de”, mais le “th” de “that”, ni même celui de “this”, rien à faire, on n’y arrivait pas. Ce n’est pourtant faute d’avoir eu d’excellents professeurs. Tous ont essayé de nous montrer comment faire, comment placer notre langue là où il fallait. Parce que c’est ça notre problème, c’est notre langue qui n’est pas assez souple, pas assez mobile, pas assez obéissante peut-être, pour aller là où l’on voudrait qu’elle aille.  Il